Mexico
vu d’en haut
J’ai eu un voisin qui était pilote
d’avions et d’hélicoptères et que j’ai accompagné durant l’un de ses vols.
Vu d’en haut, deux couleurs partagent
nettement la ville : le vert et le gris. L’ouest, depuis toujours contrôlé
par les riches, est couvert de forêts. L’est est couvert de maisons en béton, matériel
de récupération et planches. Les maisons des riches imitent les châteaux médiévaux
version Walt Disney, s’étendent sur les collines boisées, affichent des lacs
artificiels avec des canards, des cygnes et des paons et disposent de chapelles
particulières afin de remercier Dieu de l’abondance transgénérationnelle. Les
pauvres s’entassent sur les collines d’en face, faites de sable et de boues qui
s’écoulent lorsqu’il pleut.
Depuis les airs, on distingue la
ville telle une scène d’affrontement entre pauvres et riches séparés par des
avenues et des enceintes afin de ne pas se voir les uns les autres. Aucun pont
n’existe entre les uns et les autres. Les pauvres arrivent chez eux à pieds,
montant les escaliers qu’ils ont construits dans la colline de sable. Les
riches accèdent à leurs demeures par des tunnels secrets où il faut montrer des
laissez-passer à la police privée. Les riches vivent, selon eux, dans une ville
intérieure avec vue sur des centaines de pins. Les pauvres vivent, selon eux, avec
un risque absolu mais survivent grâce à la chance.
Fabrizio Mejía Madrid (escritor mejicano), Hombre al agua, 2004